D’où vient-il ce besoin
pathétique ?
pathologique ?
histrion
hystérique
dans cette chronique
de prendre ces risques
de relever les défis
les plus déplacés ?
Masculine manie
de la performance.
Peut-être aussi
que chaque chronique
doit être à tout prix
plus funambule
casse-gueule
que la précédente ?
Frôler la malséance
le cabotinage
le ratage
le mauvais goût
l’outrage.
Sinon
c’est comme si
la Señorita
ne le valait pas.
Casquette de traviole
pouce et index tendus
YO
yes daddy
vas y,
go,
putain
Just do it !
Trêve de pathos à bon dos
de fanfaronnades
d’excuses de bois
juste osons-le dire
et qu’on nous pende
si l’on se plante :
Cette chronique parle de sexe.
Elle est dédiée
à celles et ceux que le terrorisme
a touchés
dans leur corps
érotique
amoureux.
Veufs et veuves
ados vieillis
endeuillés d’amour
déchus du contact
morts à la relation
esclaves de visions
terrifiantes.
Celles et ceux dont on tua
en même temps que les proches
le dedans
l’intime
la joie d’aimer
le cœur du corps
le corps du soi
et de l’autre
celles et ceux
déficients désormais
du goût
du toucher de la vue
de l’ouïe et de l’odorat
– et de tout ce qui est
sollicité
quand il s’agit
de tenir autrui
nu contre soi.
Notre sauvageonne Leda
n’a plus cœur à la chose
depuis son arrestation
par des snipers
et son incarcération
injuste.
Nous fûmes les seuls
elle et moi
à parler à la barre
de nos vies sexuelles.
(Je n’eus pas à mentionner
proxénétisme aggravé.)
D’autres éros furent abordés
par la justice,
surtout celui
du Momo qui nous rassemble.
Nous entendîmes souvent le mot
homosexualité.
Un jour
un vieux mâle dominant
vint pisser
sur un pan de notre procès.
Le sieur Ghraieb
grâce à sa gouroute Merle
accéda quant à lui
aux secrets du tantra
hypnotique et holistique.
Comment jongle-t-il
entre ces subtilités d’Asie
et le Coran ?
On ne l’interrogea pas
à ce sujet.
Chafroud Chokri, lui,
voulait s’endormir
contre son doux Momo.
Il eût ainsi connu
le même sentiment
de chaleur humaine
de réconfort sécurisé
qu’une victime sur la Prom’
blottie contre l’épaule
de Christian Estrosi.
Attention, notre Chokri
n’est pas toujours romantique :
il ne lui déplaît pas
à l’occasion
de déchirer un cul
ainsi qu’il s’en ouvrit
par SMS
à son ami Momo.
C’était le 8 mars 2016
journée internationale des droits des femmes
et mon anniversaire.
Henaj Artan
lui
c’est l’ours
de Prom14.
Le fameux queutard
idéalisé
celui dont la virilité
jamais ne fléchit.
Ses attributs
aussi droits et infaillibles
que ses kalach
font de l’ombre
aux petits mâles normaux.
Arefa dit Ramzi-le-Cash
est-il impuissant ?
Pleure-t-il après l’orgasme ?
Que non !
Quelle idée !
Chaque syllabe de ses propos
nous révéla
combien il jouissait
de la soumission
de ses addicts.
Ramzi possède des esclaves mâles
qui le servent
le transportent,
le soir,
il leur donne
de la bouffe ou de la drogue.
On déduira facilement
qu’avec ses cokées femelles
M. Arefa
dont le temps est précieux
à cause du business
de l’hygiène de vie
s’en tient sans doute
essentiellement
à une rémunération
sexuelle
one-shot
éclair
et bucco-génitale.
Tout ce petit monde sexuel
gravite
autour d’une planète
en double sphère
– deux couilles épilées –
nommée
Louhaiej Bouhlel Mohamed.
Notre clocharde
– ainsi qu’il aime être nommé
par son plus cher ami –
se déteste tellement
de vouer cette passion exaltée
au phallus
qu’il en frappe sa femme,
en éventre les peluches
de ses enfants.
Obsédé
de la pénétration en force,
il ira jusqu’à faire substituer
sa trop modeste bite
par un camion de 19 tonnes.
Sœurs et frères victimes,
comment pourrait-on s’en sortir
sexuellement
après avoir été la cible
de ce gars-là ?
Comment se défaire
de cette idée
que la bite brise ?
(Quel mal nous font déjà
les mâles
au quotidien
dévalorisant le pénis
rien qu’en l’envoyant en photo
comme un spam
de marchandise bas de gamme
putain
les mecs
qu’est-ce que vous foutez
sérieux ?)
Sale-man Bouhlel
poussa l’obscénité
de sa douleur
jusqu’à dépouiller à l’extrême
ses victimes.
Il leur infligea
une nudité
dépassant largement
les limites du vêtement.
Il les exhiba
déshabillées
jusqu’à l’os
et l’organe.
Son carnage était aussi
une agression sexuelle.
Ne cédons pas
cependant
à la méchante facilité
de tout mettre
sur le dos de la queue.
La paternité étant masculine,
mon deuil paternel
nécessairement
est
masculin.
Me voici dans l’alcool
la solitude
Je sens un peu
la mort.
Étalonnages déréglés
étalon de même.
Capitulation.
Parfois
l’on tombe amoureux
d’un hyper-court-métrage.
Notre histoire dure
une minute quarante-cinq.
Nous ne nous revoyons jamais.
Suis-je donc la seule
victime de terrorisme en France
a faire publiquement état
de quelque impact
sur l’accès à l’érotisme ?
Ces choses dirait-on
ne sont évoquées
que dans les murmures
des cabinets médicaux
des experts du FGTI
comme si c’était là
des lieux propices.
(La pudeur m’a quitté
analysa Beigbeder
après lecture de 19 tonnes.
Je ne suis pas
complètement d’accord.
Elle a changé de référentiel.
Son ami Garcin
fut le seul à remarquer
la prépondérance du corps.)
Femmes victimes de terrorisme
qui connaissez aussi le trauma sexuel
(hé, arrêtez un peu
je crois pas une seconde
que non)
ce n’est pas que je sois
en train de vous appeler à moi
mais…
Il est dangereux
pour tout autre femme
d’être accueillie dans mes bras
dans mon malheur.
Il est presque de ma responsabilité
de l’en écarter vivement.
Tandis que peut-être
avec un
une
partenaire victime
retrouverait-on
le chemin
de la caresse
grave et sacrée,
guérisseuse de mémoire,
affranchie des pollutions
narcissiques
anciennes
surannées
du paraître
de la performance
de toute qualification
qualitative ?
Et tiens,
si faire l’amour
entre victimes
résolvait les problèmes
depuis 2016
et même carrément
depuis la naissance ?
La croix sexuelle
portée par tout un chacun ?
Tout à coup
rédemption
rachat
miracle
elle a disparu !
Hola survivantes !
De trauma certes
chacun a le sien
mais nous sommes si proches.
À l’instant fatidique
nous partageâmes
la position des planètes
des astres
des Maisons.
Nos corps de concert
subissaient le même stade
des grands cycles de la Lune
et des marées.
Peut-être qu’entre nous
un triste, subtil et pur
battement
passerait
du bout d’un doigt
à la surface d’une autre peau
pour la ressusciter ?
Tenter, oui,
la résurrection mutuelle
de nos corps non morts
ranimer la nature érectile
de chaque poil
un par un
en prenant
le temps qu’il faut.
Trembler.
Soupirer.
Sursauter.
Comme un émerveillement
une première fois
devant
l’intégrité d’une courbe
interactive
sous le baiser
peut-être amoureux
sinon juste tendre
aimant
et par-dessus tout
tellement désireux
jusque dans la pulpe
de sa lèvre
de réparer.
Soi, et elle.
Lui, et moi.
Restaurer le souffle.
Oser à nouveau
le geste d’audace
retrouver la morsure
la texture du melon
chaud-cueilli du champ
gorgé de chair liquide
du sucre et du parfum
vitaux.
Ne plus refaire l’amour
que comme une messe.
Foin de bougies et d’icônes
le nouveau temple de l’amour
n’a plus de forme
la cérémonie peut se tenir
n’importe où.
Ainsi entre soi
survivors,
balayée, la question
d’avoir ou non
à négocier avec
les avis et regards
de nos défunts là-haut
et les images
physiques et abominables
qui leur collent.
Voir soudain ressurgir
les mots et les plaisirs
ce que nous avons frappé tabou
en leurs saints noms.
Interdictions qui
menacent
de surgir
en pleine union :
réminiscence
reviviscence
des corps aimés
ou inconnus
mais morts
sanglants
dépecés
écrasés
laissés comme ça
abandonnés
pillés
piétinés
face contre terre.
Ces spectres, à jamais,
planeront sur nos ébats
comme un plafond lisse
ciel plat de nuages sombres
étendu à l’infini
jusqu’à l’horizon blanc.
L’accouplement
est accompli par terre
il n’a plus d’autre sens
que d'être.
Il se fout de nos humeurs
et de nos volontés.
Il rage.
Gronde.
L’une de vous, l’un de vous,
derniers survivants
moi réadamisé
toi révanescente,
debout nus dans ce décor,
devons-nous vraiment
recréer l’humanité
décimée sur la Prom et ailleurs
par les monstres de l’apocalypse ?
Est-ce vraiment
ce que la situation nous demande ?
Ô Dieu,
est-ce là notre mission
absurde ?
Ton horrible déluge
n’eut-il pour but
que de nous désigner Élus
pour reconstruire l’Amour ?
Ne pouvons-nous pas
plutôt
juste
nous envoyer en l’air
jusqu’à la mort
et clore le chapitre
humanité ?
Nous sommes amants
de nature divine.
Nos fluides ont des superpouvoirs.
Ils font se pâmer
les fées et fardadets
jouir
les Muses et Séraphins.
Bons coups
bons baiseurs
allez tous
vous faire foutre.
Notre orgie de victimes
solennelle
religieuse
est céleste et non avenue.
Elle se tient aux portes
du Walhalla.
(Ce thème
aussi
pour remonter
mon audience
en chute libre.
Il va y en avoir,
des déçus.
"Pute à clic".)
C'est une idée à approfondir, on pourrait créer une association, l'AQVT , l' association des qeuetards des victimes du terrorisme
C'est un privilège que de lire ce texte ! Quand le noyau dur et incandescent de l'amour rencontre la poésie .
L'horreur décidément ne parvient pas à faire taire le sublime. Je suis amoureuse de cette chronique, elle touche cœur et corps.
PRELIMINAIRES AU PRINTEMPS
Vous allez reprendre cette habitude des caresses dans les coins, des
Après-midi cachés aux voilages, des heures sans autre force que
Traîner sa peau aux parfums du vent nouveau, offrir aux
Lèvres sans eau les moyens d’en boire et d’avoir une
Envie passagère de s’appuyer contre le mur, de
Revoir un rêve les yeux ouverts ; dans l’oreille
La foule intime des ordres partagés, de la
Prière au soleil sans le regarder en face,
D’une tournure vague à la face de la
Lune pâle d’un feu blanc, d’un feu
D’alchimie rendue possible par
Le retour des soirées pleines,
Les mains vides ouvertes,
Les cheveux déployés,
Les jambes au Sud,
La joie palpitante,
Les rires noyés,
Reprends ton…
Wow... on a dérapé un peu sur le même sujet hier après-midi à Acropolis en écoutant le compte-rendu de la neuropsy au sujet de Chafroud et son ton « badin »... à deux reprises avec un petit air attendri de la dame... et là ma co(pine)-partie civile a dégainé ses chupa chups en disant : « je suis badine donc je suce »... on était dans le thème 😉